BEL-AMI
MAUPASSANT, VIE ET OEUVRE
DOSSIER CRITIQUE

 

DOCUMENT 2
Catherine BOTTHEREL : Bel-Ami, Profil

 

MAUPASSANT

UNE JEUNESSE CHAOTIQUE (1850-1870)

Bien des polémiques entourent la naissance de Guy de Maupassant, le 5 août 1850, sur le lieu de sa naissance comme sur la paternité de l'homme. Les critiques ont longtemps hésité entre la ville de Fécamp, d'où était originaire la famille maternelle, et le château de Miromesnil. Les parents du jeune Guy l'avaient loué pour que leur fils naisse dans un cadre privilégié. Flaubert, un ami de Laure de Maupassant, a été souvent considéré - à tort - comme le père de Guy : l'amitié qui les unissait est indéniable. Quant aux rapports privilégiés que les romanciers ont entretenus, il s'agit d'une filiation toute spirituelle. Les deux hommes, dans leurs lettres, se nomment respectivement "maître " et " disciple ".

L'éducation de Guy de Maupassant est un peu anarchique. Après la séparation de ses parents en 1860, le jeune adolescent doit suivre sa mère en Normandie. Il entre à l'institution religieuse d'Yvetot en 1863 et y restera jusqu'en 1868. Il ressent son séjour comme un internement, une claustration, et il est renvoyé du séminaire pour cause d'irréligion puisqu'il écrivait en cachette des textes obscènes. Il entre alors au lycée de Rouen où il fait sa classe de rhétorique : il fréquente deux grands écrivains, Louis Bouilhet et surtout Gustave Flaubert, qui vont l'initier à l'écriture.

Les années 1869-1870 constituent un tournant dans sa vie puisque, bachelier, il monte à Paris pour s'inscrire à la faculté de droit avant que n'éclate la guerre f ranco-prussienne : le conflit le marque profondément et il en sort antimilitariste.

LE FIL À LA PATTE, LE FIL DE L'EAU ET LE FIL DE LA PLUME (1870-1880)

Les dix années qui suivent sont mouvementées mais peu fécondes en succès. Maupassant mène une vie d'employé dans les ministères (de la Marine, puis de l'Instruction) qu'il juge monotone et sans intérêt: cette expérience fournit d'ailleurs la matière de nombreux récits.

Cependant, pour s'évader de cet univers carcéral et bêtifiant, il va canoter sur la Seine, à Chatou ou Argenteuil, ou rejoint sa Normandie natale. L'importance de l'eau dans sa vie est déjà sensible, importance qui ne se démentira jamais : ce thème parcourt toute son oeuvre littéraire

L’employé écrit mais, avant le succès de Boule de Suif, se cherche : il hésite. Il s'est d'abord cru poète et a publié un recueil intitulé Des Vers. Ses poèmes contiennent en germe tous les thèmes que le romancier développera par la suite. Il a également touché au théâtre et écrit différentes pièces : son art du dialogue, son goût pour le spectacle sous toutes ses formes témoignent de cet autre engouement.

Mais c'est avec la nouvelle - ou le récit court comme il le définit lui-même - que Maupassant perce. En 1880, il obtient son premier grand succès, avec la parution de Boule de Suif, dans le recueil collectif Les Soirées de Médan : le pari était d'écrire une nouvelle de guerre. Celle-ci parait conjointement aux récits de Zola ou de jeunes écrivains tels Huysmans ou Mirbeau.

LA GLOIRE, L'ARGENT, LES FEMMES

Pour gagner sa vie, il collabore à des journaux - Le Gil-Blas et Le Gaulois - en leur proposant des nouvelles mais aussi des chroniques. Maupassant s'y intéresse à l'actualité : il analyse, en critique d'art ou critique littéraire, les dernières parutions ou les textes qui lui semblent majeurs, mais évoque également les événements politiques, comme le problème de la colonisation ou du suffrage universel. Le lecteur peut donc connaître les opinions les plus personnelles de cet écrivain journaliste.

Parallèlement à ses articles, qu'il publie quelquefois sous un pseudonyme, Maupassant multiplie les publications de recueils de récits courts et de romans : La Maison Tellier (1881), Mademoiselle Fifi (1882), les Contes de la Bécasse (1883), Clair de lune, Miss Harriet, Les Soeurs Rondoli, Yvette, Les Contes du Jour et de la Nuit, Toine (1884). Son premier roman, Une Vie, parait en 1883 et marque sa dette envers son maître Flaubert, mort en 1880.

En 1885, c'est la consécration avec son deuxième roman, Bel-Ami, qui met en scène un arriviste. Le héros - " un gredin " aux dires du romancier lui-même - utilise le milieu dans lequel il évolue, la presse, pour arriver à ses fins. Ce roman dérange : même s'il ne s'agit pas d'un roman à clés, le romancier a puisé dans la réalité pour donner " l'illusion du réel ". D'ailleurs, à maintes reprises, Maupassant lui-même s'est comparé à son héros, allant jusqu'à signer certaines de ses lettres " Bel-Ami ".

Comme Bel-Ami, Maupassant a multiplié les conquêtes féminines : la période de fécondité littéraire correspond également aux succès mondains. Le romancier fréquente les salons des beaux quartiers, tels ceux de la comtesse Potocka ou de Marie Kahn. Il y côtoie d'autres artistes qui deviennent ses amis.

LA MALADIE, LA QUÊTE DE L'AILLEURS, LA MORT

Cependant sa santé s'altère. Il a contracté la syphilis et la maladie le gagne, avec ses maux physiques et psychologiques : troubles de la vue, voire hallucinations visuelles, migraines, angoisse de la folie. Dans son oeuvre, on découvre les thèmes de la maladie et de la peur de mourir : le romancier puise une fois de plus son inspiration dans sa vie, dans la réalité.

Malgré la maladie qui le ronge, Maupassant continue à produire comme s'il voulait lutter contre sa destinée : il publie des recueils de récits courts (Monsieur Parent, La Petite Roque, Le Horta), des journaux de voyages (Sur l'eau), et des romans (Pierre et Jean, Fort comme la mort). Il cherche de plus en plus à s'évader de la capitale en voyageant à bord de son bateau, le Bel-Ami, et multiplie les excursions en Normandie mais aussi en Méditerranée. Pendant l'année 1890, ce romancier si fécond publie ses dernières oeuvres - La Vie errante, L'inutile Beauté - et son dernier roman : Notre Cœur.

Après une tentative de suicide, Maupassant est interné en janvier 1892 dans la célèbre clinique du docteur Blanche, à Passy, où il meurt le 6 juillet 1893, après une agonie atroce.